vendredi 22 mai 2009

Jean-François Codère au 3e mardi: rien à faire, je ne décolère pas!

Je vous préviens, je ne suis pas de bonne humeur. 

J'étais présent à l'événement 3e mardi pour entendre le point de vue de Jean-François Codère, journaliste et chroniqueur techno en grève du Journal de Montréal, à propos des médias sociaux.

J'attendais peut-être trop. Je me disais qu'un journaliste de la nouvelle génération (28 ans, nous a-t-il dit), chroniqueur techno de surcroît, offrirait (enfin!) un point de vue de journaliste rafraîchissant et nuancé sur ce sujet. Du moins plus nuancé que celui rabâché par plusieurs de ses collègues boomers nostalgiques du « bon vieux temps ». Mais à l'écoute de son intervention, force est de constater que JFC fait la preuve par a+b que les combats d'arrière-garde et le corporatisme n'ont rien à voir avec l'âge!

JFC s'est lancé dans une présentation décousue, enfilant les clichés les plus éculés sur ce que sont ou ne sont pas les médias sociaux, sur la prétendue "pauvreté du contenu de la blogosphère et sur l'absence d'éthique qu'on y trouve".  Désolant.

D'autant plus désolant que ce que M. Coderre ne semble pas saisir, c'est qu'avec ou sans son aval ou celui de ses collègues, les médias sociaux se taillent une place de plus en plus grande dans la vie des gens, pendant que les médias traditionnels eux, particulièrement les quotidiens payants, perdent du terrain. Voilà un fait implacable, qui entraîne la majorité des grands quotidiens de l'Occident dans
une crise sans précédent et qui en amène plusieurs, pas les moindre, à fermer leurs portes. 

On peut le déplorer, on peut s'en inquiéter, mais je crois que JFC fait non seulement fausse route, il perd aussi sa crédibilité quand il tente de ridiculiser les médias sociaux comme il a tenté de le faire mardi. Il nie l'évidence énoncée en 2004 (!) par l'ex-journaliste du San Jose Mercury News Dan Gillmor, l'auteur du livre "We The Media": ensemble, les lecteurs en connaissent plus sur un sujet que le journaliste.  Il ne semble pas comprendre que les outils du web 2 permettent à ce pouvoir des multitudes de prendre sa place dans le paysage médiatique. La communauté prend sa place au côté du journaliste traditionnel dans la création, la diffusion et l'interprétation de l'information. Conséquence: le journalisme n'est plus un monopole.

Plutôt que de résister à une vague contre laquelle il ne peut rien, JFC devrait, comme le font plusieurs de ses collègues aux États-Unis et en Europe, déposer les armes et commencer à réfléchir aux manières de transformer son métier pour l'adapter à la nouvelle donne.

Voici, monsieur Coderre, quelques suggestions de navigation (sur le web franco), question de vous mettre à niveau :
-  l'atelier des médias, un site de Radio-France Internationale qui propose des réflexions fort pertinentes sur la transformation des médias;
- Le magazine L'Express a lancé une initiative en début d'année qui devrait inspirer les médias d'ici: plutôt que de demander aux journalistes de s'improviser blogueurs, on a demandé à une trentaine de blogueurs reconnus de se joindre à l'édition web du magazine. Respect. Je vous laisse lire l'histoire du point de vue de l'auteure du blogue Chroniques Ma banlieue, une des blogueuses recrutées. 
- AgoraVox et Rue89 sont deux exemples intéressants de lieux de métissage entre journalisme et participation citoyenne.

À bonne entendeur, salut!

8 commentaires:

  1. Mon Bon Serge,

    Heureux de te lire de nouveau et d'entendre toute l'indignation professionnelle dont tu peux faire preuve.

    Je ne connais pas M. Coderre et je n'ai pas assisté à sa présentation. Cela dit, et malgré la justesse et la pertinence de ton intervention, je crois qu'il fait tout simplement partie des gens (nombreux!) qui ont beaucoup de la misère à se retrouver dans cette nouvelle réalité dans laquelle, justement, les rôles sont modifiés et les acquis bouleversés. Surtout que pour les profanes (dont je suis!)il n'y a beaucoup de gens éclairés (et éclairants) sur ce paysage médias en évolution à vitesse grand V qui se permettent des explications au bénéfice des autres.

    Le manque d'encadrement traditionnel semble se révéler un défi pour plusieurs, manifestement.

    Continue à commenter, c'est toujours enrichissant de te lire.

    N. Chiasson

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  2. Désolé de vous avoir fâché, M. Leclerc, mais je vous préviens, ça ne va pas s'arranger, surtout pas avec des erreurs sur mon nom (Codère) et mon statut (en lock-out, pas en grève) dans le premier paragraphe...

    C'est peut-être ma faute, mais je vois que vous n'avez pas vraiment bien saisi mon propos.

    Où Diable avez-vous pris cette citation, puisqu'elle est entre guillemets, sur la "pauvreté du contenu de la blogosphère et sur l'absence d'éthique qu'on y trouve"? Je n'ai absolument jamais dit ça, ni textuellement ni même au sens large.

    Je crois avoir bien reconnu l'apport que peuvent emmener les blogues en expliquant qu'ils peuvent servir de point de départ à un journaliste.

    Il est indéniable que les lecteurs, collectivement, en savent plus que le journaliste. Quelle encyclopédie je serais si ce n'était pas le cas, au nombre de sujets que j'ai touchés durant ma carrière. Je ne vois juste pas en quoi mes propos de mardi dernier contredisent cela.

    Résumés très rapidement, mes propos étaient à l'effet que les médias sociaux ne sont pas des "médias" comme on l'entend lorsqu'on parle de quotidiens, par exemple, et qu'ils ne le deviendront pas non plus à mon avis. J'ai aussi dit que les blogues ne sont pas des sources d'information que l'on peut considérer comme étant fiables à prime abord.

    J'ignore avec quelle paire d'oreilles vous avez écouté ma présentation, mais il faudrait peut-être en changer.

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  3. Jean-François,

    D'abord, toutes mes excuses pour votre nom.

    Quant à votre intervention, je n'ai peut-être pas bien compris votre intention, mais si c'est le cas, je n'étais certainement pas le seul à l'avoir interprété de cette façon.

    J'imagine que la webdiffusion de votre présentation nous permettra tous de de mieux comprendre si mon interprétation était justifiée ou non.

    Serge Leclerc

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  4. Bonjour Serge - Je suis tellement heureuse que tu aies décidé de lancer un blogue et je me précipite pour l'ajouter à mon blogroll.

    Contente aussi que tu aies pu participer à notre activité mardi dernier. J'espère te revoir à celle du 16 mai, sur l'ethique et les médias sociaux, dont le thème a été inspiré par le cas Bixi et le dévoilement de l'émission Mirador de Radio Canada.

    Pour ce qui en est de la webdiffusion de l'activité du 19 mai dernier, je m'attends à ce qu'elle soit disponible sous peu. Un message à cet effet sera envoyé aux membres des groupes Facebook et LinkedIn et affiché via notre compte Twitter.

    Au plaisir d'une prochaine rencontre.

    Michelle

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  5. MAJ: notre prochaine activité aura lieu (bien sur) le 3e mardi du mois de juin .. c'est à dire le 16 juin (et non le 16 mai). Désolée pour l'erreur dans mon commentaire précédent.

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  6. La nature du débat et le type d’interventions outragées entendues mardi dernier et depuis me laissent un peu perplexe. Je suis pacifiste et ces guerres médias sociaux vs médias traditionnels – ou journalisme vs relations publiques – m’exaspèrent.

    Si on décolère ( ! ), on se dit possiblement que le mandat des médias traditionnels et celui des médias sociaux n’est pas le même. Les journaux, par exemple, rapportent des faits d’actualité, auxquels les blogueurs n’ont pas toujours accès, mais qu’ils peuvent approfondir, interpréter, analyser. Comme le font aussi les textes de fond et les éditoriaux des périodiques. Nul besoin d’être journaliste ou professionnel des RP pour distinguer la crédibilité de joepinotte.blogspot.com qui met en ligne des photos d’une intervention policière de celle d’un professionnel reconnu qui écrit sur son domaine d’expertise.

    Journalistes, communicateurs, citoyens, chacun gagne à plonger dans cette nouvelle culture médiatique et à apprécier la coexistence collaborative des médias sociaux et traditionnels. Les exemples offerts ci-dessus par Serge Leclerc le démontrent.

    Oui, les propriétaires de journaux devront ajuster leurs modèles d’affaires et certains journalistes devront revamper leurs méthodes de travail ou descendre de leur piédestal. La qualité de l’information et l’évolution de la culture doivent primer au-delà de ces considérations primaires.

    Et je me sens obligée de préciser que l’intervention de Jean-François Codère avait été présentée comme une riposte à celle de Michelle Blanc en mars, et donc on pouvait s’attendre à une suite d’affirmations frappantes. Même si un discours plus posé aurait peut-être mieux atteint la cible.

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  7. Michelle,

    Merci pour l'accueil très sympatique et pour mon entrée dans ton blogroll!

    Je ferai mon possible pour le prochain 3e mardi, pcq le sujet m'intéresse vraiment. De toute façon, je suis gagné à votre cause, c'est sûr!

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  8. Isolde,

    Merci pour ton commentaire. Tu as raison de souligner que l'intervention de JFC était une réponse à Michelle Leblanc, ce qui explique sans doute le ton.

    Mais j'aurais aimé qu'on sorte des lieux communs.

    Ceci dit, avec ce beau weekend, j'ai retrouvé le sourire! ;)

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